Jeux traditionnels: Révision

Jeux traditionnels

Dernière mise à jour le par Adriana Tenda Claude

Article rédigé par Janine Barmaz pour "Les 4 Saisons d'Anniviers"

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Les Jeux d'enfants de Pieter Bruegel l’Ancien, 1560

Le jeu est de toujours et de partout. Chaque société a inventé des activités ludiques pour distraire, intégrer et initier les individus qui la forment.

Pendant longtemps, les historiens ne se sont guère intéressés à l’étude du jeu, bien que celui-ci occupe une place importante dans de nombreuses civilisations. Peut-être parce qu’étudier le jeu, ça ne fait pas très sérieux. Au cours des dernières décennies, les choses ont changé.

Jouer pour apprendre la vie

Aujourd’hui, les jeux traditionnels sont souvent considérés comme ayant une fonction analogue à celle des contes dans le développement de l’enfant. Ils lui permettent de dépasser ses peurs en les mettant en scène. Comme les contes, le jeu confronte en effet à des problèmes essentiels. L’avantage est que, par lui, l’enfant peut se tester en ne risquant pas sa vie « pour de vrai ». Dans le jeu, il apprend à établir des règles communes et à s’y conformer. De la même manière que l’adulte doit prendre en compte les exigences de la société pour y trouver sa place.

Les jeux sont donc l’occasion de vivre et d’exercer des réalités que l’enfant rencontre dans sa vie quotidienne et qu’il rencontrera encore davantage à l’âge adulte : compétition, rivalité, lutte, nécessaire solidarité, être victime, être proie, gagner, perdre, recevoir des coups, respecter les règles, etc.

Quelques types de jeux et leurs caractéristiques

La diversité des jeux traditionnels est immense. On peut heureusement les sérier en différents groupes : jeux de poursuite, jeux de lancer, jeux de force, jeux d’endurance, jeux de saut, jeux d’équilibre, jeux de rythme, etc.

Au fil des siècles, le thème de la poursuite a donné naissance à une multiplicité impressionnante de variantes de jeu. À l’heure actuelle c’est la catégorie qui connaît encore le plus grand nombre de pratiquants chez les enfants. En font partie les valeurs sûres que sont les gendarmes et les voleurs, l’homme noir, le loup, chat perché, cache-cache, colin-maillard. Ce type de jeu donne la possibilité aux enfants de vivre, en plein jour, des peurs qui peuvent habiter leur sommeil, comme celles d’être poursuivi, d’être en danger, de devoir fuir.

Les jeux de lancer ont la particularité d’intéresser des gens de tous les âges, de la prime enfance à l’âge adulte. Ils existent dans toutes les contrées et à toutes les périodes. Ils offrent beaucoup d’avantages : ils sont simples à imaginer, plaisants à faire, adaptés aux endroits les plus divers, à un nombre fluctuant de participants. Lancer, faire rouler, arrêter une balle ou un autre objet donnent lieu à quantité de possibilités de jeux. Beaucoup nécessitent l’usage de la main ou du pied, les autres, celui d’un objet, comme une raquette ou une canne, par exemple.

La force et l’endurance ont été longtemps des qualités particulièrement valorisées par la société, puisque c’est d’elles que dépendait souvent la survie. Certains jeux, parmi lesquels on peut citer le bras de fer, les « orties » ou le « frapper sur les doigts », les mettent en valeur. Deux d’entre eux, la lutte suisse et le jet de pierre, font même partie de l’imagerie traditionnelle de notre pays.

En voie de disparition ?

Les jeux traditionnels, qui ont, pour beaucoup, traversé les siècles, courent aujourd’hui le danger de disparaître, à cause de l’arrivée d’innombrables jeux électroniques, qui séduisent du plus petit au plus grand. Il ne reste guère que la cour de récréation et la gymnastique à l’école, chez les plus jeunes élèves, comme espace de survie pour les rondes, les cerceaux, le jeu de l’élastique, les balles à deux camps, des jeux de poursuite, etc.

Bien évidemment, ce risque ne concerne aucunement les jeux de lancer qui, au fil du temps, sont devenus des sports. Eh oui, on aurait tendance à l’oublier, mais le football, le hockey, le tennis sont au départ des jeux. Leur changement de nature a pour origine divers processus :

  • La codification des règles,
  • La création des compétitions, avec gagnants et perdants (championnats, coupes, tournois)
  • L’institutionnalisation, due à l’apparition de fédérations, d’organismes de formation, d’un encadrement spécifique.

En Anniviers

Jadis, dans nos contrées, les gens jouaient aussi. Le choix du jeu dépendait de la situation (en plein air ou à l’intérieur), des participants (enfants ou adultes), du matériel à disposition, qui n’était bien sûr pas très fourni. En fait, on jouait avec ce qu’on avait. Ainsi, un jeu, assez couru par les jeunes garçons, consistait à faire tomber, en lançant une pierre, des boutons d’habit qui étaient posés sur un bout de bois, haut de 40 à 50 cm, d’un diamètre de 4-5 cm. Si les boutons tombaient du bon côté, ils devenaient la propriété du joueur.

Pour jouer au football, on faisait un ballon en formant une boule avec des bouts de tissu enchevêtrés, liés par une ficelle.

Jouer à la chandelle ou à colin-maillard ne nécessitait qu’un mouchoir.

Une variante de cache-cache était appelée potètt : une boîte de conserve, qui avait été récupérée dans un hôtel, était placée au milieu d’une place. Un joueur l’envoyait le plus loin possible d’un coup de pied. Tout le monde courait se cacher, tandis que celui qui devait chercher ramenait au plus vite la boîte au centre pour pouvoir commencer sa tâche.

Les jeux de billes étaient courants et certains enfants, filles ou garçons, étaient de vrais champions. Ils possédaient ainsi les plus belles agates.

Le jeu des osselets est connu dès l’Antiquité. Des céramiques grecques représentent des divinités en train d’y jouer. Chez nous, il est plus connu sous le nom de jeu des pierres. En effet, les cailloux ont remplacé les petits os de mouton qui étaient utilisés dans des temps plus anciens. Mais le principe de ce jeu d’adresse reste le même. Il s’agit de faire des figures en lançant et rattrapant de petits objets.

Certains jeux étaient réservés aux hommes. Le jeu de quilles était un de ceux-ci. Il était très en vogue dans la vallée. Chaque village avait un terrain où le pratiquer. Les hommes s’y retrouvaient le dimanche après-midi. Des garçons servaient de « quilleurs » : ils relevaient les quilles et touchaient quelques sous pour cela. Ce jeu était très populaire et suffisamment important pour avoir donné naissance, dans certains villages, à une société. À St-Jean, elle était propriétaire d’un terrain, mais elle n’a existé que quelques années. A une certaine époque, des sociétés locales organisaient des matchs aux quilles, à Sierre, afin de renflouer leur caisse, de la même manière qu’aujourd’hui elles organisent des lotos.

Les jeux de cartes étaient destinés aux adultes et occupaient le dimanche ou les veillées.

Enfin, les farces étaient aussi une occasion de s’amuser, aux dépens d’autrui. Elles étaient courantes dans la vie des villages et des mayens. Elles voulaient avant tout faire rire. Parfois, pourtant, elles mettaient à mal les relations entre les gens.

Jeux et plaisir

Pour illustrer ce petit tour au pays des jeux, le tableau de Pieter Bruegel l’Ancien, intitulé Les Jeux d’enfants, est particulièrement adapté. Datant de 1560, il représente 200 enfants jouant une huitantaine de jeux différents. Il dresse donc l’inventaire des jeux correspondant à un temps et un lieu donnés. Mais il n’est pas que cela, il témoigne aussi de l’éclatante vitalité qu’ont ces enfants tout entiers consacrés à leur jeu. Une vitalité à laquelle les jeux d’aujourd’hui n’offrent plus guère l’occasion de s’exprimer.

Malheureusement, une composante essentielle du jeu traditionnel a quasiment disparu : le rire. Ce rire qui accompagnait tant de situations : maladresse, culbute, chute, bousculade, collision, etc. Ce rire qui ponctuait la plupart des parties et qui permettait de digérer sans trop de mal les ratés et les défaites.

Janine Barmaz

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