Apiculture - La vie bourdonnante des abeilles: Révision

Apiculture - La vie bourdonnante des abeilles

Dernière mise à jour le par Marie-Claude Stoeri

 Article rédigé par Nicole Salamin pour "Les 4 Saisons d'Anniviers"

 

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Antille Jean-Paul et Georges Solioz

 

La vie bourdonnante des abeilles

Une ruche, des abeilles, du miel. Tout paraît simple et pourtant leur société est la plus aboutie, opaque, parfois, mais respectueuse qu’il soit. A côté des ruchers que nous connaissons, saviez-vous qu’Anniviers héberge une station de fécondation? L’été fut propice à un petit cours (théorique!) de butinage. La piquante question a été abordée en douceur avec Georges (Best) Solioz, inspecteur des ruchers en Anniviers pour le groupement valaisan d’apiculture.

 

« Bon, ben, tu veux savoir quoi, exactement? » J’allais tout de même pas lui demander de nous conter fleurette, mais dans le fond c’était à peu près ça: nous expliquer cette fameuse station de fécondation de Moiry.

Les abeilles, reines et faux-bourdons se reproduisent en se créant. Seule, une abeille n’est rien. Elle ne trouve son utilité qu’au sein de sa colonie, chaque jour à sa tâche. La reine donne vie à son rucher en pondant ses ouvrières - 2 mio d’oeufs sur une saison, 2’000 par jour - et supervise, en digne ingénieure, la tâche des bâtisseuses de rayons. Le faux-bourdon n’a pour seul rôle que de féconder la reine.

Le but recherché par cette station de fécondation est d’obtenir des reines de pure race carniolienne.

La pureté de la race des abeilles passe à notre époque par l’analyse génétique de leurs lignées.

Les qualités recherchées pour leur élevage sont la longueur de leur langue (voilà qui commence bien!), un instrument somme toute essentiel à leur survie ou arme de subsistance, leur douceur (vs. agressivité) qui permet des élevages à proximité de la civilisation et désormais leur résistance aux maladies, dont la varroa qui a par exemple détruit 30% de la population anniviarde cet hiver.

Les lignées acquièrent ainsi leurs lettres de noblesse en même temps qu’un doux patronyme: B20/13, KT02 ou 01P. Sûr qu’elles en sont fières.

Les reines sont utilisées pendant 2-3 saisons pour la procréation, car, au-delà, les qualités de la lignée se péjorent, les reines-filles deviennent alors incorrigibles.

L’analyse génétique de la reine se base sur celle de ses ouvrières. Le berger des abeilles prélève un échantillon d’entre elles qu’il place dans des boîtes d’allumettes. Il les cryogénise ensuite carrément en plaçant les boîtes dans son congélateur familial avant de les descendre à Lausanne!

L’opération se répète pour une poignée de ruchers. Au retour des analyses, il choisira 2 ou 3 parmi les meilleures colonies selon les résultats fournis par les laboratoires pour organiser l’inalpe à la station de fécondation.

Le site choisi - 2’150 mètres d’altitude - est suffisamment isolé des autres ruchers: aucun mâle non désiré ne viendra donc perturber la sélection.

Le Valais compte 4 stations de fécondation:

- Moiry, Grimentz, Val d’Anniviers

- Bonatchiesse près de Mauvoisin, Fionnay, Val de Bagnes

- Les Toules, Bourg-St-Pierre, Val d’Entremont

- L’Hongrin, Haut-Intyamon, frontière avec Fribourg

D’autres ailleurs en Suisse Romande.

A vol d’abeille, celle de Moiry, au pied du barrage, est située à 4 km du village. L’hyménoptère n’a qu'une autonomie de vol de 3 km.

Pour obtenir une bonne sélection, des colonies à mâles sélectionnés de race carnolienne sont placées dans la station (grandes ruches).

A Moiry, les ruches sélectionnées pour la reproduction par les apiculteurs du district sierrois (2 à 3 chacun) sont au nombre de 10, plus 1 de réserve en cas de pépin. Cette année et pour toutes les bonnes raisons, ils ont jeté leur dévolu génétique sur la lignée B20/13.

« Dans 1 ruche normale, moins il y a de mâles, mieux c’est », nous explique Best avec la plus simple franchise. Une société de 60’000 abeilles en élèverait environ 1’000, ce qui est suffisant, en cas de décès de la reine en place, pour en féconder une nouvelle. Celles de la station de Moiry contiennent nos reines sélectionnées et leurs souches à mâles tout autant triées sur le volet, mais dans une proportion bien plus élevée - 10 à 20 fois plus. Pour en « fabriquer » en grand nombre, il suffit de couper le cadre de ponte en 2 pour que les abeilles le reconstruisent en ne donnant vie qu’à des bourdons. Sur les 12 cadres d’une ruche, 2 seront coupés. Etonnant, n’est-ce pas?

Leur tâche dans la station est de féconder les reines, vierges, soit les petites ruchettes déposées à proximité des 11 ruches par des apiculteurs de l’extérieur. Ces reines ont été générées de façon d’ailleurs tout aussi artificielle bien qu’autrement moins simpliste que les mâles... car ce processus en plusieurs étapes nécessite l’aide attentionnée du berger. Les nucléi ainsi formées contiennent chacune une mini-colonie regroupée autour de la reine vierge, mais exempte de tout bourdon. Elles sont sélectionnées sur la base d’exigences contrôlées et amenées de façon programmée par leurs apiculteurs par groupes de 10-12 les samedi matins à la première heure. Elles resteront en villégiature à la station d’altitude une quinzaine de jours. Il y eut jusqu’à 75 ruchettes disséminées dans le parc au coeur de l’été. En cette tâche de responsable de la station de Moiry, Georges a succédé cette année à Fernand Métrailler.

Par beau temps, les reines vont quitter les ruchettes et se faire féconder par les mâles. La fécondation se passe en l’air, à plusieurs (dizaines de) mètres du sol. Lorsque la fécondation a eu lieu, la jeune reine rentre dans sa ruchette et débute la ponte quelques jours plus tard.

Après ce vol nuptial et une fois accomplie leur unique mission en ce bas monde, les faux-bourdons disparaissent définitivement de la circulation aérienne. L’amazone, elle, s’est ainsi constituée une spermathèque, un instrument de travail, en somme... Le taux de réussite des opérations est estimé à 60-70%.

L’insémination artificielle se pratique de manière anecdotique dans le monde des abeilles, à l’aide d’une simple seringue. Assez terre-à-terre, tout ça, finalement.

L’essai d’une nouvelle lignée a bien une fois été tenté par un échange avec des abeilles belges. Le résultat s’est soldé par un cuisant échec: elles sortaient autant quand il pleuvait que par beau temps... Best nous assure qu’il ne s’agit pas là d’un gag.

A mi-août, la saison de production achevée, la station a été démantelée. Ruches et ruchettes ont été désalpées.

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En Anniviers, il y a:

- 19 apiculteurs

- 6 à 10 ruches par éleveurs en moyenne, soit 200 à 250

- 3 moniteurs-éleveurs: Juilland, Bordoni, Antille

- 2 responsable de la station de Moiry: Jean-Paul Antille et Georges Solioz

- 2 inspecteurs: Benoît Zufferey et Georges Solioz

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A méditer et à consulter:

L'abeille ne vit que par son appartenance au groupe et pour ce groupe.

Elle pratique une gestion durable de l'environnement. Tandis que nous vivons aux dépens de la nature, l'abeille la fortifie.

Elle n’a pas besoin de nous, mais nous avons besoin d'elle. « Sans elle, nous n'avons que peu d’années à vivre », affirmait Einstein.

http://www.abeilles.ch

 

 

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